Théâtre / Gennevilliers
Saison 2008 - 2009
Le théâtre de Gennevilliers vient d'annoncer sa saison prochaine, fait le bilan de la saison dernière, la première du nouveau directeur Pascal Rambert. Le Centre National Dramatique ne se cantonne pas à programmer du théâtre comme le veut la tradition des CDN mais s'y fait aussi croiser les disciplines.
La saison dernière, le théâtre s'inscrivait dans la ville au travers des propositions plastiques comme celle de Daniel Buren : Des flèches rayées rouges et blanches indiquent la direction du théâtre et le cube rouge lumineux de Yann Kersalé, irradie sur le toit de l'édifice la nuit comme un point de ralliement attractif et poétique. Le théâtre signalé, celui-ci devient une plateforme entre des préoccupations intimes, de l'ordre de l'autoportrait, de la question du je, de l'autofiction dans les pièces de Rachid Ouramdane et celles de Pascal Rambert et des invitations à des chorégraphes et metteurs en scènes étrangers dont deux japonais. Ce double mouvement de l'ici qui s'articule avec l'ailleurs se retrouve au travers des cinéastes invités en résidence l'année dernière et qui est reconduit cette année, l'un est français et l'autre est étranger. Leurs films qui semblent transformer la ville de Gennevilliers à leur dire ne resteront pas de simples expériences locales que l'on regarde en complicité mais ceux-ci sont accompagnés par un travail sérieux de production et de diffusion, on pourra voir les films au Festival de Locarno ou en diffusion télévisée, c'est aussi une façon de rendre hommage au gennevillierains. Il faut dire que la question de savoir à qui s'adresse les activités du lieu n'est pas abordée ici de façon frontale. On se souvient d'une équipe d'un théâtre d'une ville voisine faisant du porte-à-porte pour faire venir les habitants de la commune au théâtre par souci éducatif, on
doute du résultat. Ici les portes sont ouvertes tout simplement et les gens entrent, les ateliers d'écritures gratuits sont très fréquentés ainsi que les répétitions publiques des spectacles. Autre expérience participant de ce mouvement est le partenariat avec la Comédie Française cette fois-ci c'est un chorégraphe congolais qui est proposé. Il va s'attaquer à Bérénice, la C.F. innove dans le genre, elle confie habituellement ses textes à des metteurs en scène, les frontières entre le théâtre et la danse deviennent enfin poreuses dans une grosse institution alors que chez les créateurs elles le sont depuis longtemps, cela fait déjà 9 ans que « les signataires du 20 août » se sont exprimés.
Dans la lignée de l'ensemble de la programmation, le théâtre aspire l'extérieur vers l'intérieur, Valérie Jouve s'intéresse au spectateur, à « qu'est ce qu'on voit ? ». La saison dernière elle a réalisé un travail photo que l'on peut voir entre autres dans le programme papier de cette saison, dans lesquelles des gennevillierains sont pris de dos , on aperçoit des bribes de la ville au-devant d'eux. Ce cadrage enlève le côté hyperréaliste de la photo, les sujets n'apparaissent pas comme sujets sociaux mais comme des personnes qui entretiennent un rapport intime et personnel avec la ville que l'on ne peut pas deviner, la seule chose que l'on suppose est la puissance imaginaire de chacun , et l'on spécule que leurs regards tout en retrait, est le lieu d'une distance active.
Cette année des collaborations se mettent en place, les pièces de R. Ouramdane et P. Rambert sont présentées comme étant en miroir, Marie-José Mondrain qui invite des philosophes à débattre est elle même invitée dans un des projets de P. Rambert, ce mode collaboratif place chaque créateur dans sa propre parole subjective contrairement au fonctionnement de nombreux CDN où, marqués par les grandes figures, tout s'organise encore autour du metteur en scène selon l'archaïque modèle de la troupe de théâtre, au service d'une idéologie commune et où la singularité est vécue comme trahison.
On se met à rêver, et on imagine que Céleste Bourseiller emplirait le foyer du théâtre d'oiseaux sautillant sur les cordes de guitares amplifiées, il n'en sera pas ainsi, ce sera à nous visiteurs de nous envoler vers l'écriture par le biais d'un dispositif informatique en libre service qui invite à laisser des phrases, ces dernières seront transformées en partitions et jouées par un piano mécanique. La présentation de saison s'est terminée par une phrase de Pascal Rambert, « nous sommes fatigués, sur les genoux, cela a été rock and roll, » on ne fait que saluer l'attitude.
Lieu: Théâtre de Gennevilliers
Ce texte paru dans les échos du site internet paris-art.com, n'apparaît plus dans leurs archives.